Le « syndrome d’aliénation parentale » (SAP) est un concept non fondé scientifiquement qui décrédibilise les mères et leurs enfants et les met potentiellement en danger.
Dans le cadre d’un projet international (2020-2023) supervisé par Simon Lapierre du Collectif de recherche FemAnVi de l’Université d’Ottawa, Solidarité Femmes s’est engagée à récolter des données de type quantitatif pour pouvoir dresser un état des lieux de l’utilisation du concept en Belgique, et ainsi pouvoir mettre ces données en regard de celles récoltées dans les autres pays participant au projet. Le projet international se décline en quatre objectifs de recherche:
- Interroger l’évolution des discours et des pratiques psycho-sociales utilisant l’aliénation parentale
- Analyser les impacts de ces discours et de ces pratiques sur les femmes ayant subi de la violence ainsi que sur leurs enfants, mais aussi sur le travail des associations d’aide aux victimes
- Enumérer les stratégies mises en oeuvre tant par les femmes que par les associations et les équipes de recherche pour contrer ces discours et démontrer le non-sens et les risques liés à ces pratiques
- Développer des outils pour aider les femmes ainsi que les associations de terrain et les équipes de recherche à contrer ces discours et à démontrer le non-sens et les risques liés à ces pratiques
En juin 2024, FemAnVi a convié les partenaires du projet à participer à Ottawa au International Forum on Parental Alienation and Domestic Violence. Les partenaires ont eu la possibilité d’échanger sur leurs réalités propres et de présenter des exemples de bonnes pratiques. Solidarité Femmes y a présenté le projet pilote DiAPE.
Aussi, une autre recherche de type qualitatif cette fois et portant exclusivement sur l’utilisation du concept en Belgique est actuellement en cours. Cette dernière est indépendante du projet international.
« Syndrome d’aliénation parentale »: plaît-il ?
Le « syndrome d’aliénation parentale » (SAP) a été décrit par le pédopsychiatre Richard Gardner comme un ensemble de troubles psychologiques présents chez l’enfant ou l’adolescent dont un parent dit « aliénant » essaie de l’éloigner de l’autre parent (le parent « aliéné ») par une campagne de dénigrement et de diffamation injustifiée, à la limite de l’endoctrinement. Ce soit disant syndrome n’est pourtant pas répertorié au sein du DSM et n’a finalement pas de fondement scientifique. Richard Gardner lui-même est un personnage controversé en raison notamment de certaines affirmations pro-pédophilie. Dans un contexte de violences conjugales, il arrive très souvent que l’auteur des violences, au moment de décider des modalités de garde des enfants après la séparation, accuse la mère d’aliénation parentale. Ce faisant, il la décrédibilise et perpétue à son égard une forme de violence conjugale. Dans le cas où ces accusations sont prises au sérieux par un juge, la sécurité même des enfants peut être compromise: un danger est bien réel mais la parole et le ressenti de la mère et des enfants ne sont pas entendus, on veut maintenir coûte que coûte le lien parental avec le père.
Aussi, en raison de sa diffusion croissante, de plus en plus d’intervenant·es des secteurs psycho-médico-sociaux sont séduit·es par ce concept sans forcément avoir pleinement conscience des risques qui lui sont associés et surtout sans tenir compte d’éventuelles violences conjugales ou intrafamiliales présentes ou passées (critère qui devrait pourtant être primordial dans l’attribution du droit de garde des enfants). Les insinuations d’aliénation parentale formulées par des intervenant·es psycho-médico-sociaux peuvent là aussi compromettre la sécurité des enfants et être vécues comme une violence institutionnelle pour des mères déjà fragilisées par les violences de leur ex-conjoint.